Faudra-t-il que les suicides se multiplient pour que la question de la souffrance au travail devienne un objet légitime de préoccupation ministérielle ? Pourtant les analyses sont là, et la FSU y a largement contribué, qui montrent combien la dégradation des conditions de travail affecte de plus en plus gravement l’ensemble des personnels de l’Éducation nationale.

Mais comment pourrait-il en être autrement quand la complexité croissante des missions s’accompagne d’une réduction constante des moyens. Subrepticement, les tâches supplémentaires s’ajoutent les unes aux autres. Et c’est par attachement aux finalités du service public d’éducation, que les agent.es cherchent à les assumer au prix d’une dégradation des conditions de travail qui finit par les épuiser. Parfois, c’est même pour répondre aux missions les plus élémentaires que les agent.es se trouvent contraints d’en faire toujours plus.
Mais la question est loin de n’être que quantitative. Les obsessions du contrôle, de la rentabilité budgétaire, de la normalisation enjoignent des consignes dont il est difficile d’imaginer qu’elles visent un meilleur fonctionnement du système ou de l’intérêt général. C’est le sens même du travail qui se perd. C’est ce que nous explique Christine Renon, dans la lettre qu’elle nous adresse avant de se donner la mort : travailler toute la journée, sans cesse et au-delà des limites réglementaires du temps de travail… et le soir, ne plus trop savoir à quoi va servir tout ce que l’on a fait. La stratégie autoritariste tente parfois de suppléer à ce manque de sens par une exigence d’obéissance vécue par les agent.es comme illégitime et injuste et dégradant davantage le travail quotidien. Et nous ne pouvons qu’être inquiets des évolutions qui seront induites par la loi de transformation de la fonction publique quand l’affaiblissement du paritarisme viendra renforcer l’arbitraire des décisions concernant les carrières et les mutations.

Les conséquences psycho-sociales de cette perte de sens sont multiples et graves sur la santé physique et morale des personnels. Aucune statistique transparente ne vient en mesurer la réalité exacte.
Nous ne pouvons accepter cette dégradation du travail qu’aucune fatalité ne peut légitimer. C’est pourquoi nous exigeons que le ministère considère la question des conditions de travail comme une priorité de son action qu’il s’agisse de retrouver les moyens nécessaires à l’exercice des missions ou de réaffirmer le respect et la reconnaissance du travail de chacun·e comme une valeur incontournable et essentielle du service public.