Communiqué FSU
Les Lilas, le 15 févrieri 2010
Après 6 lois en moins de 5 ans, le gouvernement s’apprête à nouveau à restreindre les droits des étrangers sans titre de séjour, et en particulier le droit d’asile et les procédures permettant d’y faire appel. Pour cela le gouvernement tente de mettre en place une loi d’exception. Ce texte limite l’accès au droit en réduisant fortement les possibilités de faire appel à la justice : 48h au lieu d’un mois pour un appel contre une Obligation à Quitter le Territoire Français (OQTF), affaiblissement du rôle du juge des libertés (rallongement du temps avant passage devant la justice, 5 jours au lieu de 48h, et le prolongement de la durée de rétention).
Ainsi, après l’affaire des 123 kurdes arrivés le 22 janvier dernier sur une plage du sud de la Corse, internés d’office en Centre de Rétention Administrative (CRA) et libérés par la justice car le droit n’avait pas été respecté, le Ministre de l’Identité nationale, son débat n’ayant pas permis de gagner suffisamment l’électorat d’extrême-droite, se lance à nouveau dans la course à l’échalote du moins-disant humanitaire en matière d’accueil d’étrangers en situation de détresse.
La solution est simple : puisque l’arrivée sur une plage risque de permettre aux personnes de faire appel au droit d’asile, et par conséquent de bénéficier d’un délai de 30 jours pour déposer un recours suspensif devant le tribunal administratif en cas de remise d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Il suffira de faire sortir ce territoire du droit commun et de le transformer en zone d’attente pour non seulement légitimer la privation immédiate de liberté des personnes mais aussi de les faire repartir sans délai, les personnes n’ayant plus que 48 heures pour déposer un recours.
On assiste là à un tour de passe-passe indigne où le droit est détourné au bénéfice de l’idéologie, et la justice soumise à un affaiblissement manifeste, particulièrement pour ce qui concerne le juge des libertés et de la détention.
En passant, on allonge la durée maximale des délais de détention de 32 à 45 jours, on permet à l’administration de justifier de retards pris dans la notification de la décision, l’information des droits et leur prise d’effet afin d’empêcher, comme ce fut le cas avec les kurdes arrivés en Corse, le juge des libertés et de la détention de libérer les personnes pour retard pris dans la notification de leurs droits. Ce projet de loi réinvente la double peine : les OQTF peuvent à nouveau être assorti d’Interdiction du Territoire Français de 3 ou 5 ans.
En matière de lutte contre le travail illégal ce projet prévoit bien une amélioration des droits des salariés sans papiers et dissimulés : augmentation de l’indemnité de rupture de la relation de travail passant de 1 à 3 mois, rappel des salaires sur trois mois minimum, information obligatoire sur leurs droits par les autorités de contrôle…Cette évolution fait suite à la directive européenne «Sanctions» qui prévoit des droits pour les salariés, et à l’avis extrêmement sévère à l’égard de la France qu’a rendu le BIT en mars 2009. Celui-ci, saisi par la FSU, a dénoncé le détournement des missions de l’inspection du travail lors de contrôles conjoints avec la police qui ne permettent pas l’application des dispositions protectrices du code du travail à l’égard des travailleurs sans papiers. Cependant, si les droits des salariés sont renforcés, cela n’empêchera toujours pas leur reconduite à la frontière.
Pour le reste ce projet ne s’attaque toujours pas aux donneurs d’ordre véritables bénéficiaires de l’emploi d’étrangers sans papiers ni à la moralisation de la sous-traitance.
La FSU dénonce cet avant-projet de loi et invite les citoyens pour qui la liberté et la justice a un sens à s’opposer à ces nouveaux reculs de l’Etat de Droit. L’acharnement aveugle et électoraliste des autorités politiques de ce pays sur les questions d’immigration pose des problèmes graves quant au maintien des droits et des libertés dans notre pays. La FSU s’opposera résolument à cette nouvelle attaque contre les droits fondamentaux.