Par Bernadette GROISON, Secrétaire générale de la Fédération Syndicale Unitaire (FSU), Thibault RENAUDIN, Secrétaire national de l’Association de la Fondation Étudiante pour la Ville (AFEV), Bruno TARDIEU, Délégué national du Mouvement ATD Quart Monde France.
Monsieur le Président,
A l’heure où s’ouvre la conférence sur la lutte contre la pauvreté et les exclusions, notre pays est divisé, nourri de la peur de l’autre, marqué par les injustices sociales, et qui voit se développer exclusion, pauvreté, précarité, inégalités, toutes formes de violence auxquelles sont confrontés beaucoup de nos concitoyens.
La marginalisation, la ghettoïsation, la stigmatisation, la criminalisation de toute une partie de la population (qu’il s’agisse des jeunes, des immigrés, des chômeurs) ont fragilisé la culture et l’envie de vivre ensemble et de partager un destin commun.
La pauvreté est la première des violences faite aux citoyens. Ces dernières années, les écarts entre les plus riches et les plus pauvres se sont considérablement creusés, et les mesures fiscales aggravent encore ce phénomène ; dans le même temps, la pauvreté et la précarité atteignent des niveaux alarmants, le chômage fragilise l’équilibre de notre pacte Républicain, chômage particulièrement fort chez les jeunes qui ont le sentiment, où qu’ils se trouvent sur le territoire, que notre société ne leur offre pas plus de place que de droit à l’erreur. Sans parler de nos quartiers populaires, qui en dehors d’efforts sur la rénovation urbaine sont très largement délaissés et subissent inégalités et discriminations flagrantes.
Les politiques d’austérité pèsent sur les plus fragiles; la crise économique que traversent nombre de pays sert aussi à imposer aux peuples des efforts au nom d’une situation dont ils ne sont pas responsables.
Trop de citoyens, et particulièrement les plus pauvres, ont le sentiment de ne plus être considérés comme des citoyens à part entière et se sentent hors de la démocratie. Les minima sociaux marquent une volonté de justice sociale sont devenus un stigmate pour ceux qui les reçoivent : menacés d’en être exclus, radiés des listes, sommés de justifier chaque jour davantage de leur difficile situation, ils sont humiliés par cette politique de chasse aux prétendus fraudeurs ou profiteurs. De nombreuses personnes renoncent même à les demander. Ainsi, 1 million de personnes auraient droit au RSA, mais ne le réclament pas tant cette idéologie a fait son effet.
La peur de devenir un « inutile », mis au ban de la société est pour nous révoltante : nous attendons de votre gouvernement qu’il rompe avec toute politique de criminalisation des personnes en difficulté d’insertion sociale. En effet, le paroxysme est certainement de considérer ces personnes comme responsables de leur situation en les taxant « d’assistées ». A cela s’ajoute le sentiment d’être utilisés, méprisés, triés.
Atteintes au droit du travail, durcissement des mesures dites sociales, discours culpabilisant, désignation de bouc émissaire,… ces violences génèrent souffrance et défiance que nous nous refusons à accepter !
Nous défendons l’impérieuse nécessité de construire une société apaisée, une société de la confiance et de la solidarité. Retrouver l’apaisement, c’est retrouver des raisons de vivre ensemble et donc de faire ensemble. Pour nous, cela passe par l’affirmation de droits élémentaires pour tous les citoyens, droit au logement, à l’emploi, à la santé, à l’éducation. Ces droits, il faut faire en sorte qu’ils existent en prenant des mesures volontaristes, à commencer par une véritable réforme fiscale à même de mieux répartir les richesses de notre pays et de conforter la place des services publics afin d’en garantir l’égalité d’accès.
Vous avez fait de l’Education une priorité, et placé la jeunesse au cœur des préoccupations du pays. Les attentes sont fortes pour démocratiser la réussite au sein de notre système éducatif aujourd’hui trop inégalitaire. Est-il utile de dire que les enfants dont les familles connaissent de telles conditions de vie, ont très peu de chances de connaitre la réussite scolaire. Ces jeunes ont plus que les autres besoin d’une autre politique, tant sociale qu’éducative. Ils en seront les premiers bénéficiaires.
Nous sommes, Monsieur le Président, convaincus que chaque citoyen doit avoir sa place dans notre société. Que notre pays bénéficie de nombreux atouts, dont ses jeunesses que vous avez mises au cœur de votre projet Présidentiel. De tiers secteurs puissants et mobilisables, de corps intermédiaires prêts au dialogue et à la concertation, de citoyens disposés à faire changer les choses au service de l’intérêt général.
Monsieur le Président, nous sommes déterminés à agir pour améliorer la situation de tous et faire respecter les droits de chacun. Notre ambition est de retrouver une société du respect et de la justice sociale. Nous sommes décidés dans nos responsabilités respectives à faire vivre et à défendre cette nouvelle société de la confiance.