Ce colloque a tenu ses promesses.
Les propos de qualité et constructifs des différent-e-s intervenant-e-s, les échanges avec les participant-e-s, les témoignages instructifs des collègues vont contribuer sans aucun doute à notre réflexion collective et à la construction de propositions. Je remercie une nouvelle fois tous nos intervenants, tous nos collègues venus témoigner, nos invités et le secteur Education de la FSU (Véronique, Valérie, Guislaine, Paul) qui ont permis que se tienne ce colloque.
Ce colloque montre combien il y a d’énergie, d’intelligence et d’engagement pour transformer les intentions de réussite de tous les jeunes en réalité. Et si le sondage que nous avons commandé à Harris interactive dresse un constat sévère sur le système éducatif, puisque pour trois français sur quatre il fonctionne mal et produit des inégalités, dans le même temps ce sondage nous invite à l’optimisme puisqu’il nous indique que les attentes sont fortes envers le rôle que l’École doit jouer. Ce qui constitue autant de points d’appui pour poursuivre nos actions.
Alors, nous tenons à l’issue de ces travaux à réaffirmer trois grandes idées que nous continuerons de défendre avec force, particulièrement dans les prochains mois :
Oui, tous les jeunes sont capables de réussir.
Contrairement à ce qu’affirment certains, disant que les jeunes ne sont pas faits pour l’École, nous pouvons nous dire que c’est peut-être l’École qui ne sait pas assez bien faire avec ces jeunes.
Le sondage d’Harris interactive confirme cette exigence : trois français sur quatre estiment que le rôle prioritaire de l’École est d’assurer la réussite de tous les élèves. Mais que veut dire « Réussir à l’école » ? C’est d’abord, pour ces personnes sondées, que chaque jeune puisse suivre sa propre voie. Finalement, cela rejoint ce que dit la FSU lorsqu’elle parle de la nécessité pour chacun de réussir sa vie personnelle et professionnelle.
Or, il n’a échappé à personne que ce sont toujours les mêmes, les plus fragiles, ceux des classes populaires (la moitié des élèves) qui échouent le plus à l’École ? Ceux que certains voudraient sortir de manière précoce du système éducatif, ceux pour qui l’apprentissage aurait un effet magique alors que nous savons maintenant que l’apprentissage réussit surtout aux élèves d’un bon niveau scolaire.
A l’inverse de cela, nous allons inlassablement continuer d’affirmer que tous les jeunes peuvent réussir à l’École et qu’il lui revient d’en créer les conditions. Benoit Falaize nous a très bien montré comment il était difficile pour l’Ecole de traiter un certain nmbre de sujets complexes. Comme le lien, parfois peu visible, qui existe entre la question de la laïcité et celle des inégalités. L’Ecole a pourtant une responsabilité à traiter ces questions difficiles qui traversent la société, questions que bien souvent cette dernière n’arrive elle même pas à résoudre.
C’est pour tout cela que notre proposition de scolarité obligatoire jusqu’à 18 ans a du sens. Parce qu’elle laisse du temps aux apprentissages et à l’orientation. Et bien sûr elle se décline dans un schéma de scolarité différent de celui d’aujourd’hui. Elle suppose de mieux penser et organiser le parcours scolaire de la maternelle à l’université, de penser mieux les programmes et les cohérences entre les différents niveaux d’apprentissages…
Oui, il n’y a pas de fatalité et l’École doit lutter davantage contre les inégalités.
C’est aussi un enjeu majeur pour la société. A un moment ou tant de questions se posent sur le « vivre ensemble », la cohésion sociale, il faut retenir cette question de Jean Paul Delahaye : Comment des élèves qui n’ont pas bénéficié de la même ambition et des mêmes droits pourront-ils penser avoir les mêmes devoirs lorsqu’ils seront adultes ? Et Benoit Falaize nous a invité à faire aussi preuve d’une même ambition pour tous les élèves. Alors oui, Stéphane Bonnery rappelle justement que si on ne peut pas tout à l’Ecole, on ne peut pas rien !
C’est pourquoi nous allons continuer de répéter que la lutte contre les inégalités commence dans la classe. Stéphane Bonnery a rappelé que les inégalités trouvent leur origine dans les résultats scolaires, donc dans les apprentissages. Les exigences en terme de contenus sont aujourd’hui plus élevées qu’hier. Du coup, la question de l’implicite, du décalage entre la culture scolaire, les objectifs assignés au système éducatif et la culture des élèves favorise l’accroissement des inégalités.
Alors ? Pour maintenir une même ambitiion pour toutes et tous, il faut se doter des moyens et donner les outils aux enseignants. Il faut donc centrer les efforts sur les conditions de scolarisation, dont la question des effectifs qui n’est pas un faux sujet, la pédagogie, avoir une grande vigilance et poursuivre les débats sur ce qui est et doit être enseigné, développer un plan ambitieux de formation initiale et continue des enseignants et de tous les personnels, développer la recherche… Aujourd’hui plus que jamais il nous faut rappeler l’importance de la culture commune. Benoit Falaize nous l’a rappelé : Jean Zay plaidait que la culture commune est pour tout le monde !
Il faut également définir des politiques interministérielles (santé, sport, culture, logement…) permettant d’enrayer les inégalités dans les territoires. Le dispositif REP doit être conforté et doté des moyens nécessaires, avec toujours cette vigilance à concerver les mêmes ambitions pour tous, et la mixité sociale favorisée.
Il faut aussi en finir avec les pressions de la société en faveur de la sélection et de la compétition et à l’inverse de cela il faut travailler à la coopération et au vivre ensemble. Et plusieurs collègues nous ont rappelé dans leurs témoignages qu’il nous fallait mieux travailler avec les familles. C’est d’autant plus important que nous savons maintenant que des liens de qualité entre les parents et l’École contribuent à la réussite des élèves. Et puis, l’École est un lieu de pratique de la démocratie et de la citoyenneté.
Dans la lutte contre les inégalités nous retenons enfin l’alerte de Nico Hirtt sur les risques de marchandisation de l’école et sur ceux d’un adéquationnisme primaire entre l’École et son environnement économique, créant toujours plus d’inégalités.
Le service public est la meilleure garantie possible d’égalité. Le service d’éducation l’a déjà prouvé ; il est plus que jamais urgent de lui permettre de jouer tout son rôle.
Oui, il est urgent d’aller plus loin dans la transformation du système éducatif.
Les propositions faites par la FSU et ses syndicats permettraient d’éviter le gâchis de l’échec scolaire, du décrochage, de passer de la résistance aux apprentissages d’une partie des élèves à une envie d’école, au désir d’apprendre. Je veux d’ailleurs redire combien, avec tous les syndicats de la fédération, nous menons de débats comme ceux d’aujourd’hui, partout sur le territoire, avec les collègues : journées d’automne du SNUipp, colloque en janvier prochain sur l’Education prioritaire, colloque du SNES en mars prochain sur la démocratisation du lycée (et où donc il sera aussi question du collège), journées en novembre du SNEP sur l’EPS et la réussite de tous les élèves, le livre à venir du SNUEP sur les 30 ans du bac pro suite à son colloque de l’année dernière…
Alors, n’en déplaise aux pourfendeurs de la dépense publique, il faut poursuivre les efforts budgétaires engagés (postes, crédits…), tout simplement parce que l’Éducation n’est pas un coût pour la société mais un investissement pour aujourd’hui et pour demain. Et, alors que les débats risquent d’être vifs en pleine campagne des élections présidentielles, nous pouvons nous appuyer sur le sondage Harris interactive pour la FSU qui révèle que pour 9 français sur 10 il faudra poursuivre les investissements budgétaires et humains engagés ces dernières années !
La transformation du système éducatif passe aussi par l’amélioration des conditions de travail des personnels. De nombreux collègues ont témoigné de l’alourdissement de la charge de travail, des questions qui se posent sur le temps de travil, des difficultés à travailler en équipe… Nous sommes à l’opposé des propositions de certains candidats qui, en toute méconnaissance de la réalité du terrain, propose encore d’augmenter le temps de travail… Les extraits de film projetés à ce colloque montrent l’expertise des personnels, leur engagement professionnel. Jean Paul Delahaye a d’ailleurs souligné justement que les résultats positifs obtenus par le système éducatif (par exemple, le rappel fait par Stéphane Bonnery : 10 % de bacheliers en 1959, 72 % en 2011) sont le fruit du travail des fonctionnaires. Il est bon de le rappeler dans la période !
Il faut donc faire davantage confiance à l’expertise des professionnels de terrain, en rompant avec les injonctions hiérarchiques éloignées de la réalité, en encourageant le travail collectif, en rendant en somme les personnels acteurs et concepteurs de leur métier.
Mais il faut aussi être très exigeant sur les conditions de travail, le temps de travail, le développement du travail en équipe et le respect des missions « cœur de métier ».
Leur expertise, leur engagement en est un ciment efficace. Encore faut-il permettre de renouer en toute sérénité avec les débats, même contradictoires, afin de construire des perspectives.
Il ne faut donc être ni dans la méthode Coué, ni dans le déclinisme.
Il faut accepter de tout mesurer. A propos de PISA, nous retenons notre difficulté à enrayer l’échec scolaire. Pour autant Nathalie Mons nous a invités à aller au-delà des moyennes et regarder ce que cela nous dit des politiques scolaires. Et regardons aussi du côté de la recherche qui est riche d’enseignement.
Il faut aussi accepter de tout entendre. Pour notre part, nous montrons régulièrement que nous sommes ouverts pour discuter de tout. Mais il n’en n’a pas toujours été le cas du côté gouvernemental où certaines contestations (rythmes scolaires ou collège) n’ont malheureusement pas été entendues. Cest une erreur lourde de conséquences.
Un engagement de la FSU pour tous les jeunes, les personnels et la société tout entière.
La complexité du monde, l’évolution culturelle, technologique de notre société, l’évolution des besoins de la population, des métiers et du travail, l’exigence de démocratie, l’émergence de nouveaux métiers…. nécessitent de faire de l’éducation et de la formation une priorité. Qu’elle soit initiale (et celle-ci est essentielle car difficile d’ancrer des formations ensuite), continue ou professionnelle, toute formation doit être de qualité et qualifiante. Plus que jamais il faut tout mettre en œuvre pour que chaque jeune y ait accès, pour qu’il réussisse son parcours scolaire et pour élever le niveau de qualification de tous. C’est le rôle du service public d’éducation, qu’il s’agisse de l’éducation nationale comme de l’enseignement agricole public.
Comme nous l’a dit Jean Paul Delahaye « la question n’est pas technique mais politique : il faut donc une volonté politique pour permettre la réussite de tous. » Stéphane Bonnery nous invite à sortir de la culpabilité les enseignants, les élèves et les familles.
L’heure n’est donc ni au bricolage ni au renoncement. Elle est à l’engagement total pour l’éducation et la formation. Pour la réussite de tous les jeunes ! C’est le défi que, pour notre part, nous sommes prêts à relever !