M. le président, Mme et M les membres du CSE,
M. le Ministre,
Ce CSE se tient un mois après l’assassinat de notre collègue, professeur de français, Dominique Bernard, victime d’un acte terroriste commis dans la cour de son lycée par un ancien élève radicalisé. Toutes nos pensées vont une fois encore à ses proches ainsi qu’aux proches du professeur d’EPS et des deux agents de la région grièvement blessés. Nous adressons également de nouveau tout notre soutien à l’ensemble de la communauté éducative de la cité scolaire Gambetta Carnot meurtrie par ce drame. Si le temps passe et qu’une actualité en chasse une autre, nous ne devons jamais oublier que l’école publique et laïque est devenue la cible de tous les obscurantismes qui ne tolèrent pas son rôle émancipateur.
Comme il y a 3 ans, après l’assassinat de Samuel Paty, professeur d’histoire-géo tué parce qu’il faisait son métier, de nombreuses femmes et hommes politiques se sont empressé·es d’exprimer leur soutien à la communauté éducative et de réaffirmer le rôle essentiel de l’école comme rempart contre l’obscurantisme. Mais il ne suffit pas de convoquer l’idéal de l’école de la République. La FSU demande des actes forts pour renforcer l’école en lui donnant les moyens y compris matériel et humain de réduire les inégalités, de permettre à tous les élèves de progresser et de trouver leur place à l’école pour réussir. Si l’amélioration de la sécurité des établissements scolaires est une nécessité, elle ne doit pas éclipser la question de l’amélioration des conditions d’enseignement et des conditions de travail pour améliorer le niveau de l’ensemble des élèves.
La FSU rappelle son opposition au concept de « savoirs fondamentaux ». C’est bien à travers une culture commune dont l’ensemble des disciplines concourent sans hiérarchie que les élèves pourront développer leur niveau de culture générale.
Monsieur le ministre, l’agenda social que vous avez ouvert dans un laps de temps contraint et traitant de multiples sujets, comme par exemple la formation initiale ou encore l’exigence des savoirs, inquiète la FSU tant sur la forme que sur le fond. Si l’on veut réellement résoudre les problèmes que vos prédécesseurs n’ont pas réussi à régler, voire même ont amplifié au cours de ces 15 dernières années, la FSU pense qu’il faut le faire en se donnant du temps pour réellement analyser la situation, en réfléchissant et en redéfinissant au préalable les objectifs que doivent porter ces réformes, afin de proposer des solutions partagées par la profession pour qu’elles puissent être mises en œuvre pour l’amélioration du système éducatif, dans l’intérêt de tous les jeunes. On ne pourra pas régler tous les problèmes en quelques semaines ou en quelques mois. Pour la FSU le dialogue social ne doit pas être qu’une vitrine. Les réformes incessantes sans bilan et souvent refusées par la majorité des organisations syndicales représentatives, puis imposées aux personnels, ne sont pas de nature à améliorer l’école.
La réforme en cours sur les lycées professionnels en est un bon exemple. Il est encore temps de faire machine arrière et de proposer une autre réforme dans l’intérêt des élèves et des personnels. Les lycées professionnels doivent revenir sous la tutelle unique du ministère de l’éducation nationale. Les objectifs qui doivent lui être assignés ne doivent pas être différents des autres voies du lycée. La FSU rappelle que l’examen du baccalauréat doit sanctionner une formation équilibrée qui ouvre la voie à la poursuite d’études supérieures et à l’insertion professionnelle, et ceci quel que soit le bac et qu’il doit vérifier un niveau de connaissances, de compétences et de culture défini par les programmes du lycée (article L 333-4). La FSU rappelle aussi (article L122-2) la responsabilité de l’État de mettre en œuvre les moyens de la prolongation de scolarité pour les élèves qui n’auraient pas atteint un niveau de formation sanctionné par un diplôme national, ou un titre professionnel enregistré et classé au niveau 3 du RNCP et de garantir le droit au retour en formation initiale sous statut scolaire. La priorité pour les élèves qui n’auraient pas de diplôme à l’issue de l’examen du baccalauréat doit donc rester l’obtention d’un diplôme. Le dispositif Ambition emploi doit s’inscrire dans cet objectif y compris par la mise en œuvre d’actions d’adaptation professionnelle qui, rappelons-le, peuvent être encouragées et assurées par l’État qu’au profit des élèves qui cessent leurs études sans qualification professionnelle (Article L122-3). La qualification ne peut donc pas disparaître au profit des compétences et le lycée professionnel ne doit pas se transformer en organisme de formation. Les discussions en cours sur la réorganisation de l’année de terminale et les pistes envisagées par le ministère du Travail sont pour nous proprement scandaleuses. Cette structuration ne répond en fait qu’aux préoccupations d’un ministère en charge de l’emploi et de l’insertion professionnelle dont le souci premier est d’apporter des réponses à la pénurie d’emploi qui se généralise, par le développement de politique dans son champ de compétence notamment celle de la formation professionnelle qui n’a fait qu’accélérer le problème.
Si l’on veut réellement améliorer le niveau de tous les élèves, il ne faut plus transformer l’École pour résoudre les problèmes posés au marché du travail, et encore moins essayer de répondre aux demandes et attentes des organisations patronales.
Concernant le GT attractivité, comment peut-on penser réformer une énième fois la formation des enseignant·es en proposant un temps de réunion de travail avec les organisations syndicales aussi limité. Est-ce qu’on peut sérieusement penser qu’il suffirait de déplacer la place du concours pour le 1er et second degré pour résoudre tous les problèmes de viviers ? Là-encore, ce sont des solutions simplistes qui se proposent de résoudre des problèmes pourtant complexes nécessitant un temps de réflexion et des groupes de travail multiples. Contenus de formation, place de l’université dans ces formations, place des formateurs et formatrices, fonctionnement des INSPE, parcours des étudiant·es, pré-professionnalisation, aides financières, place du concours, entrée dans le métier qui doit être, rappelons-le, progressive et en connexion avec la formation continue : c’est bien l’ensemble de ces sujets qu’il faut traiter et cela ne peut pas se faire en quelques semaines. La FSU s’inquiète de la transformation profonde de l’école que vous souhaitez mener qui foisonne de contradictions et d’idées simplistes, elle demande que l’ensemble des problématiques qui se posent au système éducatif soient traitées en profondeur et avec sérieux. Elle continuera à porter ses revendications pour une école de la réussite de toutes et de tous.
La FSU soutient l’action initiée par l’intersyndicale de la voie professionnelle et appelle les personnels à se mobiliser lors de la journée d’action du 12 décembre pour la défense de l’Enseignement professionnel public.
Je vous remercie.