M. le ministre
M. le directeur
M. le président
Mmes et MM. les membres du CSE
Ce CSE se déroule une semaine après la mobilisation historique du 19 janvier contre le projet de contre-réforme des retraites porté par Emmanuel Macron et rejeté par une très large majorité des salarié·es. Les personnels de notre ministère étaient majoritairement en grève. Ils ont participé massivement aux manifestations pour dire non à cette contre-réforme, mais aussi pour exprimer leur colère face au manque criant de considération qui n’a duré que trop longtemps.
Il est inadmissible que le gouvernement augmente l’âge de départ en retraite, allonge la durée de cotisation et maintienne la décote alors que le système de retraite est largement excédentaire et suffit pour abonder les pensions actuelles et futures. Il est inadmissible que la réduction des pensions serve à renflouer le service public. Il y a d’autres ressources : une véritable taxation des profits par exemple et le retour de l’ISF.
Monsieur le Ministre, neuf mois après votre entrée en fonction, vous multipliez les signes d’une continuité toujours plus forte avec la politique éducative néfaste menée par votre prédécesseur. L’absence de reconnaissance des personnels s’accompagne d’un désinvestissement. Vos réformes éducatives accentuent le caractère ségrégatif de notre système éducatif. Dans un contexte de pression historique sur les salaires, vous décidez de ne pas revaloriser les salaires de tous·tes les enseignant·es de 10 %, alors que le Président E. Macron l’avait annoncé pour tous et toutes. En proposant aux enseignant·es de rentrer dans un « pacte », vous vous entêtez dans votre doctrine du « travailler plus pour gagner plus », alors que les enseignant·es travaillent déjà au-delà des 35 heures. Aujourd’hui ils ont besoin de travailler mieux, dans de meilleures conditions et dans le respect de leur liberté pédagogique. Seules ces conditions permettent de lutter contre les inégalités scolaires grandissantes et favorisent la réussite de tous les jeunes. L’institution doit donc enfin reconnaître ses personnels et les rémunérer à leur juste valeur, sans contreparties de missions ou de tâches supplémentaires.
L’austérité salariale pèse lourdement sur le quotidien des personnels mais aussi sur l’attractivité des métiers de l’éducation. Les inscriptions aux concours diminuent une nouvelle fois pour la prochaine session. Vous continuez ainsi d’organiser la pénurie de l’ensemble des personnels de votre ministère, et portez une lourde responsabilité sur les dégradations présentes et futures du service public d’éducation.
La rentrée 2023 se prépare avec 1 117 suppressions de postes dans le premier degré et 481 suppressions dans le second degré qui s’ajoutent aux 8 381 emplois supprimés depuis six ans. Les conditions de travail se détériorent pour tous les personnels avec des effectifs dans les classes de plus en plus chargés. Votre politique éducative, loin de représenter une rupture, accentue le resserrement sur les « fondamentaux » et le pilotage autoritaire notamment par les évaluations nationales qui sont élargies au CM1 et à la 4e. Elle manifeste une vision idéologique de l’école qui conduit au renforcement d’inégalités scolaires socialement marquées, et à la mise sous tutelle des métiers de l’Éducation nationale.
Celle-ci s’incarne aussi dans le déploiement et l’imposition d’évaluations d’écoles et d’EPLE chronophages dont nous demandons l’abandon.
Les questions éducatives sont donc plus que jamais un terrain d’affrontement où se jouent sens du métier et finalités de l’école. La défense et la popularisation d’un projet émancipateur pour l’école sont nécessaires, pour que la profession parvienne à résister à cette entreprise de dépossession du métier et d’aggravation des inégalités scolaires.
La FSU oppose, à cette vision des apprentissages et à l’encadrement des pratiques qui en découle, une culture commune construite sur un réseau de savoirs et de compétences. Elle doit permettre aux jeunes de quitter le système éducatif avec les clés de compréhension du monde, avec les moyens de continuer à se former, leur permettre l’émancipation et la participation citoyenne.
Malgré l’invisibilité et le manque de considération dont souffrent les lycées professionnels (LP), la volonté du Président E. Macron de les « réformer » a ouvert le débat sur leur place et leur rôle dans le système éducatif. Les mobilisations intersyndicales ont permis d’arracher un premier recul en empêchant la ministre Carole GRANDJEAN d’imposer sa réforme dès la rentrée 2023.
Elle n’a cependant pas renoncé à son projet. Elle continue à vouloir favoriser l’apprentissage en s’appuyant sur son prétendu « modèle » partant du faux postulat que l’on se formerait mieux en entreprise qu’en LP. L’aide à l’embauche d’apprenti∙es a été prolongée pour cette année, 6 000 euros pour la première année de contrat quel que soit l’âge de l’apprenti∙e, avec la volonté de poursuivre son développement, notamment dans les lycées par la mise en place de la mixité des publics.
Malgré le déficit chronique de la caisse de France compétences, renflouée, elle, tous les ans par le budget de l’État, contrairement à celle des retraites, le gouvernement persiste à vouloir mettre les jeunes de plus en plus tôt sur le marché de l’emploi au détriment de leur formation, continuant ainsi à faire pression sur les salaires.
Ainsi, la réforme des LP, comme celle des retraites, s’inscrit dans votre vision ultra libérale de votre politique du « plein emploi ». Sur le fond, votre ministre déléguée chargée de l’Enseignement et de la Formation professionnels n’abandonne rien et entend passer par des expérimentations menées dans les établissements pour appliquer les « 4 points du socle de la réforme ».
La FSU continuera à combattre cette réforme qui, si elle était mise en œuvre, serait un recul de 100 ans du système éducatif, dont vous porteriez la responsabilité.
Les contrats de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles sont en cours de réécriture au niveau des régions. Les enjeux y sont importants notamment pour les lycées professionnels et leur offre de formation. Pour la FSU, au regard des enjeux de formation des jeunes et des enjeux de société, le ministère doit prendre ses responsabilités et garantir une offre de formation qui ne soit pas pensée au prisme des besoins immédiats des entreprises et des territoires.
Dans un marché de formation qui fait la part belle aux organismes privés et qui cherchent des profits rapides, vous avez la responsabilité de garantir et de développer le service public d’orientation de l’Éducation nationale (c’est-à-dire les CIO) et le service public de la formation professionnelle, seuls garants de l’intérêt général.
La FSU a rappelé hier lors de son conseil délibératif fédéral national la nécessité de poursuivre et d’amplifier la mobilisation contre le projet de réforme des retraites. Avec une intersyndicale unie, elle appelle à faire du 31 janvier une nouvelle journée historique de grève et de manifestations pour :
- l’amélioration des conditions de travail des personnels de l’éducation,
- une réelle reconnaissance et une revalorisation salariale de l’ensemble des personnels,
- une réforme plus juste des retraites, avec un départ à la retraite à 60 ans, une durée de cotisation à 37,5 ans et la suppression de la décote. Seules ces conditions permettront à tous les personnels de partir en retraite en bonne santé et avec un montant de pension qui permette de vivre dignement.