Mme la Ministre,

Sur l’ensemble des sujets, la FSU fait le même constat : le gouvernement continue à vouloir réformer le système éducatif à marche forcée sans prendre en compte l’avis des personnels et de leurs organisations syndicales. Au mieux, celles-ci sont tenues informées de l’avancée des travaux menés  par vos services sans qu’aucun débat ni qu’aucune évolution ne soit réellement possible.

Le ministère compte donc passer en force sur tous les sujets en reprenant en main la formation des personnels dans un cadre devenu de plus en plus rigide, afin de les obliger à mettre en œuvre des mesures qui ne font pas sens pour eux. De ce fait, le ministère est de plus en plus déconnecté des réalités et des problématiques des professionnel·les de terrain que nous sommes, alors même que nous demandons au quotidien des réponses urgentes pour permettre un meilleur fonctionnement du service public d’éducation. Face à l’ensemble des difficultés qui vont s’accentuer avec les réformes envisagées (choc de l’autorité, choc des savoirs, réforme de la Voie Pro, réforme de la formation initiale des enseignant·es, Acte 2 de l’école inclusive …), il y a en effet urgence à entamer un réel dialogue, basé sur un diagnostic partagé, sur ce que doivent être les priorités de l’Éducation nationale et leurs politiques de mises en œuvre dans un calendrier réaliste. Mme la Ministre, nous vous demandons solennellement, encore une fois, un changement profond de méthode afin de garantir un réel dialogue social dans l’intérêt du système éducatif, de son personnel et de ses usagères et usagers.

Concernant la réforme du recrutement et de la formation des enseignant·es, au-delà du calendrier intenable, la FSU s’inquiète des contenus et du statut des futur·es lauréat·es. De nombreux points demeurent à clarifier, notamment le déroulement des sessions de concours et le statut des lauréat·es en M1. De plus, les épreuves écrites et orales ne sauraient délaisser toute réflexion didactique et privilégier la capacité à exécuter une tâche d’enseignement plutôt qu’à la concevoir. La FSU reste farouchement opposée à la désuniversitarisation de la formation initiale et rappelle la nécessité de la mise en place de prérecrutements avec des aides financières pour augmenter le nombre de candidates et candidats aux concours de l’Éducation nationale.

Concernant l’Acte 2 de l’école inclusive, la FSU persiste dans sa demande de création d’un corps de fonctionnaires de catégorie B pour les AESH, ainsi que son opposition aux PIAL et au projet d’expérimentation des PAS à la rentrée 2024. Elle plaide également en faveur d’une redéfinition du temps de travail des AESH, incluant l’accès à des emplois à temps complet et intégrant des temps de concertation, de formation et de préparation.

La FSU, tout en critiquant les projets touchant à la santé à l’école, qui semblent sacrifier la lutte contre les inégalités sociales et de santé, demande un renforcement de chaque métier de la santé scolaire et la création d’emplois pour assurer une présence effective dans les écoles et établissements. Elle soutient également les droits LGBTQIA+ et encourage la participation aux marches des fiertés.

Dans l’enseignement professionnel, la rentrée 2024 s’annonce très tendue avec l’application pleine et entière de la réforme Grandjean et les difficultés de recrutement.

La FSU alerte sur les pressions croissantes exercées sur les enseignant·es pour accepter davantage d’heures supplémentaires et pour gérer le nombre accru de dispositifs mis en place depuis la rentrée 2023.

L’organisation du parcours différencié en terminale BAC PRO avec l’avancement des examens début mai va être une véritable usine à gaz qui va mettre en péril l’organisation des LP. Sa mise en œuvre concrète va se heurter à la réalité du terrain : la fin d’année scolaire sera ingérable pour l’ensemble des personnels. Ce n’est pas faute d’avoir alerté à maintes reprises le ministère, qui en sera pleinement responsable. Pour les élèves, c’est toujours moins de formation et plus d’injonction à aller travailler le plus rapidement possible. Pour les enseignant·es, c’est toujours plus de tri, de plus en plus tôt,  entre les élèves qui iront travailler et celles et ceux qui poursuivront leurs études.

La FSU exige toujours le retrait de cette réforme et appelle à des discussions ouvertes en vue d’une réforme véritablement favorable à la réussite de toutes et tous les élèves de LP.

Le gouvernement vient de supprimer les aides à l’embauche de contrat de professionnalisation, sous prétexte de faire des économies, alors que l’on sait très bien que ces contrats se reporteront en grande partie sur les contrats d’apprentissage pour contribuer à l’objectif de 1 million d’apprenti·es voulu par E. Macron d’ici la fin du quinquennat. C’est dans ce contexte que l’IGESR et l’IGAS viennent de rendre public un rapport d’octobre 2023 sur «la qualité de la formation professionnelle». Il dévoile que seulement 0,3 % des CFA seraient contrôlés. Le 21 mai, le haut-commissaire à l’Enseignement et à la Formation professionnels, Geoffroy de Vitry, avait  indiqué –  lors d’une réunion à laquelle la FSU n’était pas invitée – que les conclusions et recommandations de ce rapport serviraient de base à des travaux visant à réformer le système de qualité de la formation professionnelle qui devraient aboutir le 5 octobre 2024.

La FSU s’interroge sur sa mise à l’écart des discussions en cours et demande à participer à ces travaux, dans l’objectif de remettre de la régulation et du contrôle notamment pédagogique dans un système qui part à la dérive… financière. Au-delà de l’aspect quantitatif du développement de l’apprentissage, il serait effectivement temps pour le gouvernement de donner les moyens aux ministères concernés de contrôler la qualité des formations mises en œuvre par apprentissage, notamment dans les CFA privés.

La contestation du « Choc des savoirs » continue de s’exprimer parmi les personnels et les parents d’élèves à travers tout le pays. Elle se manifeste par diverses initiatives telles que le refus de constituer les groupes de niveaux, désormais rebaptisés « groupes de besoin » par le ministère, des opérations symboliques comme les « collèges morts », ainsi que par des réunions publiques et des manifestations, à l’instar de celle du 25 mai, qui s’est tenue « contre le choc des savoirs mais pour l’École publique ». Cette opposition à la politique de « tri social » des élèves prend de l’ampleur, malgré l’indifférence affichée par le gouvernement qui mise sur l’épuisement des contestations. Le « Choc des savoirs » détériore les conditions de travail des personnels et vise à restreindre leur liberté pédagogique. La FSU appelle les personnels à ne pas mettre en place les groupes de niveau et à poursuivre le travail d’information auprès du grand public. Elle rejette également le dispositif « prépa-Seconde », considéré comme une voie de relégation pour les élèves recalés au DNB, et encourage les professeurs principaux à ne pas le promouvoir auprès des familles. Concernant les évaluations nationales, dont le ministère a décidé de généraliser l’application du CP à la seconde dès la rentrée prochaine, la FSU les perçoit comme des outils de tri des élèves et de contrôle des pratiques enseignantes.

Face à cette situation critique et à un tournant sans précédent dans l’histoire de l’École publique, la FSU lance un appel solennel à l’ensemble de la communauté éducative et à tous les personnels pour qu’ils refusent de mettre en œuvre les dispositifs du « Choc des savoirs » et qu’ils défendent une école publique, laïque et émancipatrice. La FSU réitère son appel à ne pas trier les élèves et à maintenir la pression jusqu’à la fin de l’année scolaire. Elle exige le retrait de toutes les mesures du « Choc des savoirs » et prévoit de nouvelles mobilisations dès la rentrée, en vue de construire un mouvement de grève unitaire avec les parents d’élèves et leurs fédérations.

La FSU, à l’initiative  de la mobilisation pour la défense de l’école publique laïque, poursuit avec détermination son travail de sensibilisation et de mobilisation unitaire visant à mettre fin au financement public de l’école privée. Elle exige un renforcement des moyens alloués au service public d’éducation : création de postes supplémentaires, améliorations des infrastructures scolaires et revalorisation salariale significative.