Journée « Tous unis contre l’extrême droite » 29 janvier 2014

Intervention de Bernadette Groison, secrétaire générale de la FSU

Cette journée du 29 janvier est une date importante. Notre initiative est un succès.

Nous pouvons être fiers d’avoir donné le départ d’un mouvement qui va maintenant se démultiplier. Je remercie tou(te)s les militantes et militants de nos organisations qui ont travaillé depuis des mois à l’organisation de cette journée et contribué ainsi à la construction de ce mouvement unitaire contre l’extrême droite, pour la démocratie et la liberté.

Cette journée est la preuve de notre engagement. Salariés du public et du privé, chômeurs, étudiants, lycéens, jeunes et retraités, ensemble nous disons : mobilisation.

Mobilisation car il est grand temps de dire stop. Et bien sûr nous n’avons pas attendus aujourd’hui pour le dire. Nous sommes de tous les combats contre les exclusions, contre le racisme, contre l’homophobie ou le sexisme : RESF, mariage pour tous, droits des femmes, luttes au côté des sans papiers, des Roms, manifestations contre le racisme… dans le droit fil de nos histoires syndicales, de nos convictions. Nous sommes de tous ces combats parce que nous croyons que la société peut et doit être plus juste, plus solidaire, plus égalitaire.

Notre initiative a lieu à un moment où les mouvements d’extrême droite ne cachent plus ni leurs idées, ni leurs intentions et assument leurs actes. Après le drame de Clément Méric, les « affaires » Taubira, Dieudonné, la Manif pour tous ou encore les offensives anti-IVG, les remises en cause du programme « ABCD Egalité » et même des agressions par le Printemps français de certains de nos locaux syndicaux, dimanche dernier, la manifestation « anti-Hollande » a vu défiler multiples groupes et mouvements d’extrême droite et depuis lundi, les appels à un jour de retrait de l’école se sont multipliés, mettant au grand jour les idées homophobes, sexistes et sectaires de ces mouvements.

Mais nous savons que l’extrême droite se nourrit aussi de la situation de crise économique et sociale actuelle comme elle l’a toujours fait dans l’histoire. Cette crise est aussi une crise culturelle et une crise politique.

C’est pourquoi il faut aujourd’hui et de manière urgente, apporter des réponses à cette crise qui a des conséquences dramatiques. Le chômage et la précarité touchent particulièrement les femmes et les jeunes. Les inégalités se creusent, la précarité se développe, fragilisant toujours plus les populations les plus défavorisées. La stagnation, voire la baisse, des salaires et pensions pèsent aussi sur tous. Cette dégradation se retrouve dans tous les domaines dans le monde du travail où le travail est davantage synonyme de souffrance ou précarité que d’émancipation, dans la vie de tous les jours. Les politiques d’austérité nous enferment, en France comme partout en Europe, dans une récession qui nous mène dans une impasse si nous n’arrivons pas à y mettre un terme. C’est pourquoi la FSU appelle à participer massivement à la manifestation du 4 avril prochain organisée par la CES.

Car c’est dans les moments difficiles que les salariés, les citoyens ont besoin des organisations syndicales.

Il est nécessaire de répondre aux besoins sociaux et ce dans chaque territoire. Répondre à l’intérêt général, c’est notamment le rôle des services publics. Les services publics « une question de dignité humaine et de cohésion sociale » selon la définition que nous a léguée Stéphane Hessel. Mais la réduction de la dépense publique nous prive de services de qualité et ouvre des espaces à des services privés qui, nous le savons, par leur coût, excluent nombre de citoyens de l’accès à certains services. Cette situation renforce encore les inégalités entre les citoyens et entre les territoires.

Mais le modèle social n’est pas un vain mot pour nous. François Hollande fait le choix de faire porter les aides aux entreprises, aides toujours sans contrepartie ni contrôle, sur la dépense publique. Ce sera donc encore moins de services publics alors que pour la sortie de crise, pour l’avenir, nous avons besoin des services publics. C’est pourquoi nous nous attachons par exemple à démocratiser notre système éducatif et l’enseignement supérieur. Nous savons que les inégalités scolaires sont corrélées aux inégalités sociales. Situation qui compromet toujours plus les choix de vie personnelle et professionnelle des plus défavorisés. Chacun doit pouvoir être maître de son destin.

Nous ne laisserons donc pas remettre en cause ni les services publics, ni la protection sociale !

Il faut aussi gagner de nouveaux droits, conquérir de nouveaux espaces pour faire vivre la démocratie : dans les entreprises, dans les services publics, dans les établissements et les universités : la parole, les exigences des salariés, des jeunes, des usagers doivent être entendues.

Il ne suffit pas de dire que les valeurs sont essentielles, encore faut-il les faire vivre. Encore faut-il que pour chaque citoyen et citoyenne, elles aient du sens. Egalité, solidarité, justice, liberté….c’est dans le quotidien, dans l’accès à l’emploi, à l’éducation, à la culture, au sport, à la santé, au logement etc. dans le respect de chacun et de chacune, que ces valeurs existent ou n’existent pas. Réaffirmons la laïcité comme valeur fondamentale intrinsèque de la société. La laïcité qui permet le vivre ensemble quelles que soient ses opinions, ses convictions religieuses ou non. Et nous n’accepterons jamais que l’Ecole publique soit le terrain d’une instrumentalisation des élèves et des familles à des fins partisanes, religieuses et extrémistes. Face au repli sur soi, au repli identitaire, nos propositions syndicales fondées sur l’égalité et la fraternité, ainsi que sur la nécessité du rassemblement de tous les salariés sont les meilleures réponses. Toutes les avancées sociales ont été gagnées par les luttes menées par les organisations syndicales. Le sens de l’histoire, c’est nous !

Notre rôle d’organisation syndicale est de redonner confiance et espoir. Or, le dernier sondage Cevipof doit nous interroger lorsque nous y lisons que la confiance à l’égard des organisations démocratiques (partis politiques et organisations syndicales) ne dépasse pas 30%…

C’est pourquoi nous prenons l’engagement non seulement de déconstruire le programme du Front national et de dénoncer le danger que représente aujourd’hui l’extrême droite mais pour cela, nous décidons d’agir ensemble, de mettre nos forces à la construction d’alternatives afin d’enrayer cette montée de l’extrême droite.

Avec cette journée du 29 janvier, nous avons construit et continuerons à le faire, un argumentaire syndical pour aller sur le terrain, dans les entreprises, les administrations, les universités pour expliquer que le Front national travaille contre les salariés, les jeunes et les plus démunis. Ce parti ne fera rien des colères qui s’expriment ici ou là car il est au service des tenants des richesses et du libéralisme.

Le Front national est une imposture sociale, les solutions sont ailleurs.

Et c’est possible. Et c’est le moment de le dire et de se mobiliser. Car nous ne confondons pas inquiétudes, peurs, doutes…l’énergie de la désespérance avec une adhésion à l’idéologie d’extrême droite. Il serait injuste et stupide de laisser croire que les habitants de ce pays soient devenus racistes ou homophobes. Notre rôle est aussi de clarifier les propos et intentions des uns et des autres, de ne pas laisser faire les amalgames, de redonner la réalité des campagnes menées par l’extrême droite souvent surdimensionnée. Il s’agit de faire entendre les voix de la raison, de la démocratie. Porteur d’un syndicalisme de transformation sociale, c’est un projet de société que porte la FSU.

Alors oui, résolument aujourd’hui, nous disons ensemble que nous refusons la banalisation de ces idées et des actions menées par l’extrême droite. Mais aujourd’hui, nous allons bien au-delà de l’indignation et de la dénonciation. Nous lançons un message de responsabilité et d’espoir. Et nous appelons toutes les organisations à nous rejoindre dans cette voie. Ensemble nous devons offrir d’autres perspectives à tous les salariés, chômeurs, jeunes et retraités pour que demain soit meilleur qu’aujourd’hui, pour de nouveaux jours heureux.