1er tour de table
Retraites
L’augmentation de la durée de la vie justifierait l’allongement de la durée de vie au travail. Cet allongement n’est pas une donnée nouvelle de 2013, pas plus qu’il ne l’était en de 2010. C’est bien le chômage et la stagnation des salaires qui creusent les déficits et pour la FSU, il ne peut être question de faire payer cette crise aux salariés et aux retraités, aux jeunes que cet allongement écarte un peu plus longtemps de l’emploi.
En fait, cette affirmation présentée comme une évidence esquive une question de fond : à qui profite le progrès humain ? L’augmentation de la productivité doit elle servir à l’enrichissement d’un petit nombre ou doit elle profiter au plus grand nombre en réduisant la durée du travail au cours de la vie tout en assurant à tous des conditions d’existence sures et décentes ?
Le choix de la FSU, c’est celui du partage du travail et de la richesse. Elle récuse le postulat des réformes récentes, sous jacent aujourd’hui à la recherche de « l’équilibre financier » qui imposerait de figer la part des richesses versée aux plus âgés par les régimes de retraite publique alors qu’ils représentent une part croissante de la population. Evoquons seulement le rôle des retraités dans la vie sociale, déterminant pour la vie des associations, pour le lien social.
En contraignant le financement, les réformes passées ont programmé la baisse des pensions et accru les inégalités. Aujourd’hui les femmes et les salariés qui ont connu la précarité, les nouvelles générations demain sont victimes de la décote sauf à renoncer à partir à la retraite à l’ouverture de leurs droits. La décote ne peut être abordée comme un élément du choix des individus. Pour ceux qui sont encore en emploi, le choix peut être déterminé par le besoin de consacrer du temps à la génération aux ascendants et aux descendants. Les femmes seront plus nombreuses que les hommes à faire ce choix.
Il faudrait aujourd’hui allonger encore la durée de l’activité, la porter à 44 ans. La génération 1978 a acquis à l’âge de 30 ans presque 12 trimestres de moins que la génération 1950. Est-il juste et surtout crédible de lui demander 14 trimestres de plus pour le taux plein ? Le gouvernement a pour objectif que 50% d’une classe d’âge valide un niveau L3. La société en a besoin. La prise en compte de la formation ne peut pas se limiter à mieux valider les périodes d’apprentissage, à prendre en compte la durée des stages.
Notre responsabilité aujourd’hui est de reconstruire la confiance et de corriger les injustices installées. Discuter d’une prochaine réforme doit être l’occasion d’une remise à plat, de faire le bilan des précédentes réformes. Il faut débattre des objectifs que nous fixons aux régimes de retraite et assurer leur financement. Pour la FSU, ces objectifs demeurent ceux du droit à la retraite à 60 ans et d’un taux de remplacement de 75% auxquels il faut ajouter l’objectif d’une revalorisation des pensions sur l’évolution des salaires. Ces objectifs sont communs à l’ensemble des salariés, ce qui suppose pour les atteindre de prendre en compte la spécificité des régimes et des situations. Et ce sont ces objectifs qui doivent être l’horizon de pilotage, les outils de statistiques et de projection grâce à la qualité qu’ils ont atteinte peuvent servir cet objectif ?
La FSU attend du gouvernement qu’il indique les orientations qu’il entend retenir pour le projet de loi qui sera élaboré cet été afin que la concertation se fasse dans la clarté. Le rapport de madame Moreau n’est pas un projet de réforme et le moment où chacun s’exprime sur ce rapport n’est pas celui de la concertation. Il n’est pas acceptable de réduire le temps de la concertation à la seule période de l’été.
2ème tour de table
Pour la FSU, si l’on ne devait donner qu’un objectif à cette réforme, ce serait redonner confiance, en particulier aux plus jeunes dans notre système de retraite.
Alors comment faire ? En lui assignant des objectifs sociaux clairs et intangibles : Le taux de remplacement pour une carrière complète ne peut pas être une variable d’ajustement !
Pour rétablir la confiance, la durée d’assurance à retenir doit être réalisable par le plus grand nombre. Elle doit donc être confrontée à la réalité des carrières professionnelles, prendre en compte le recul de l’âge d’entrée dans la vie active, les périodes d’interruption ou de précarité, les fins de carrières. Elle ne peut être fixée indépendamment d’un arbitrage sur ce qu’elle prend en compte. Le rapport le pointe a contrario, en proposant la suppression de la majoration de la durée d’assurance liée à la naissance et à l’éducation, ce que nous ne pouvons accepte de décote / surcote, qui amplifient les inégalités liées à l’allongement de la durée d’assurance et déforment considérablement le principe de contributivité en éloignant la pension d’un montant proportionnel à la durée de l’activité.
La situation des polypensionnés doit enfin faire l’objet d’un examen approfondi. Il y a besoin d’une approche moins restrictive que celle de la commission, limitée aux poly pensionnés des régimes alignés. Cette situation est celle d’une majorité des fonctionnaires, de la presque totalité des fonctionnaires de la FPT, qui pour la moitié d’entre eux liquidaient il y a peu leur pension au minimum garanti.
Il y a besoin de reconstruire les minima de pension et du point de vue de la FSU, une carrière complète ne saurait déboucher sur une pension inférieure au SMIC.
Ces chantiers dont nous attendons l’ouverture sans retard doivent s’appuyer sur le bilan des du rapport de janvier 2013 ont donné un éclairage très intéressant pour le régime général. Un travail analogue doit être fait dans la Fonction publique et cela doit être de notre point de vue le premier objet des concertations que la FSU demande et que le rapport Moreau propose de conduire régulièrement. Il y a d’autres sujets que la FSU souhaite aborder comme par exemple la spécificité des carrières de certaines professions, les fins de carrière, la cessation progressive d’activité.
Il faudra aussi, Madame la ministre, se pencher sur la répartition des champs d’affiliation des régimes complémentaires privé et public puisqu’une lettre pour le moins malheureuse vient de remettre en cause le consensus en place depuis 42 ans.
Enfin, les règles de pilotage à moyen terme préconisées par le rapport Moreau nous inquiètent particulièrement. En se faisant par la boite noire des salaires portés au compte dont le coefficient d’actualisation serait modulable selon les circonstances, il pourrait avoir pour conséquence de faire basculer les retraites vers un système à cotisations définies. C’est surtout choisir le critère le moins lisible et le moins compréhensible par les salariés. C’est donc contraire avec l’objectif de clarté nécessaire au rétablissement de la confiance. La proposition de modifier une règle fondamentale du code des pensions en substituant au traitement des six derniers mois un salaire de référence déterminé sur la base des dix derniers années ne trouve aucune justification dans le rapport de Mme MOREAU, aucune si ce n’est vouloir créer des « salaires portés au compte » pour les fonctionnaires et pouvoir disposer du même outil de pilotage qu’au sein du régime général.
Si l’équilibre financier du système est nécessaire – et la FSU a des propositions à faire – il ne peut être un objectif en lui-même. Pour la FSU, l’horizon du pilotage, c’est le financement des objectifs sociaux décidés collectivement.