Les droits fondamentaux sont-ils en recul dans la période?
La crise sanitaire que nous traversons a conduit à des mesures exceptionnelles. Et je partage évidemment le souci de préserver la santé de toutes et tous. Mais je remarque que, dans un silence pesant, des libertés considérées jusque-là comme fondamentales s’éclipsent tour à tour. Je m’inquiète surtout de ce que la nécessité de protéger en toutes circonstances nos droits et libertés, et de renforcer nos services publics, ne fasse pas l’objet d’un débat public approfondi. Depuis le mois de mars, le Défenseur des droits n’a eu de cesse d’alerter sur les conséquences des mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire pour l’exercice de nombre de nos libertés.
Le rôle du parlement n’est-il pas minoré ?
Les décisions prises par le gouvernement durant cette crise sanitaire, ainsi que la proposition de loi sur la sécurité globale, me conduisent à alerter encore sur le rôle de contrôle que l’Assemblée nationale et le Sénat doivent absolument exercer et qui est, à ce jour, insuffisant. Dans mon avis du 17 novembre sur la sécurité globale, j’ai considéré que les parlementaires n’ont pas été mis en mesure de jouer pleinement leur rôle de fixer, en application de l’article 34 de la Constitution, les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques. Quant à l’état d’urgence sanitaire, entre contraintes sanitaires et impératifs économiques, il n’a été laissé que peu de place à la défense des droits et libertés qui sont pourtant au fondement de notre État démocratique et de notre République. Enfin, intégrer des mesures d’exception dans le droit commun c’est affaiblir les principes de notre droit et le rôle du Parlement.
Interview issue de la revue POUR n°229, décembre 2020; à lire ici!