« Les fonds de pension doivent être développés »

FAUX !

On retrouve encore une fois un discours patronal, relayé par certain.es politiques, pointant la nécessité de compléter la retraite par répartition par des systèmes de capitalisation, c’est-à-dire des fonds de pension. Ces fonds de pension en France n’existent pas ou très peu en tant que tels, au grand dam du monde de la finance et d’une partie du monde politique. Mais leur avatar, l’épargne-retraite, encore faible, tend à se développer. Sous cette appellation qui se veut plus rassurante, on retrouve les mêmes écueils que ceux des fonds de pensions classiques. Notamment leur caractère profondément inégalitaire. En effet, seuls les cadres et une partie des salarié.es des grandes entreprises ont une réelle capacité d’épargne.

Alors que le système par répartition est un système de solidarité collective, le système par capitalisation repose sur la capacité de chacun.e à se constituer sa propre retraite, il est donc par essence inégalitaire.

Il est aussi plus risqué. Vouloir développer la capitalisation et les fonds de pension, c’est aussi oublier bien vite les déconvenues vécues en 2008 par un grand nombre de retraité.es, notamment nord-américains, qui ont vu leur retraite fondre de 30 % à 70 %, et qui ont parfois été forcé.es de reprendre des petits boulots pour ne pas sombrer dans la misère. 

Lorsque les taux d’intérêt sont faibles, a fortiori quand ils sont négatifs, les fonds de pension ne parviennent plus à payer les retraites de leurs souscripteurs, faute de rémunération suffisante des produits. Dans ce cadre, la réalisation de produits financiers est empêchée, de sorte que les prestations des retraité.es doivent être soit diminuées, soit financées par une augmentation des cotisations. Le problème démographique resurgit donc, et pousse les gestionnaires des fonds vers des actifs de plus en plus risqués. L’aventure des subprimes peut donc se reproduire, et la recherche de profits financiers provoque aussi ce que certains nomment des licenciements boursiers : des entreprises rentables sont poussées à réduire les effectifs pour accroître la part accordée aux dividendes, ou pour être revendues à la découpe.

Enfin, pour se prémunir contre les faillites, les contrats proposés aux épargnants sont de plus en plus fréquemment à cotisation définie et à prestation incertaine. La capitalisation est donc beaucoup moins sûre que la répartition car elle dépend des aléas financiers et il est illusoire de croire que la sphère financière peut générer sur le long terme plus de valeur que la sphère productive. Il peut y avoir des moments d’euphorie, mais les retournements et les crises sont aussi très fréquents.

Le montant des cotisations relatives à la retraite supplémentaire aussi bien via une souscription individuelle que collective avec les plans d’épargne retraite d’entreprise s’élève à 18,5 Mds€ en 2022 contre 12,6 Mds€ en 2018. Quant au montant des prestations versées, il s’élève à 8,3 Mds€ en 2022 contre 6,6 Mds€ en 2018. Cela reste fort heureusement limité par rapport aux régimes publics obligatoires même si les volumes sont en augmentation. En 2022, la cotisation annuelle moyenne sur les contrats individuels est de 3430 € et celle sur PER d’entreprise collectif et Perco est de 2230 €.