Ce CSE se déroule dans le contexte particulier de la préparation concrète de la rentrée 2011 dans les écoles et EPLE. Les véritables ravages créés par les suppressions de postes massives apparaissent clairement et déclanchent des luttes justifiées. C’est une dégradation considérable des conditions d’enseignement, des conditions d’étude et de scolarisation des jeunes et des conditions de travail des personnels qui est en cours : suppression de classes, augmentation des effectifs par classe, réduction de l’offre scolaire, multiplication des heures supplémentaires, augmentation de la précarité,… c’est bien l’avenir des jeunes qui est mis en cause et la capacité du système à faire réussir tous les élèves. Mais est-ce bien, quoi qu’il en dise, le choix fait par ce gouvernement ?
La circulaire de rentrée publiée au BO du 5 mai 2011 ne saurait réduire nos craintes. Elle est sans surprise tant elle reprend et confirme les mesures déjà en cours ou déjà préconisées. Elle est significative de l’absence totale d’écoute et de prise en compte des remarques et propositions des organisations syndicales, dont la FSU et ses syndicats qui, avec les personnels de l’Education, ont dénoncé tout au long de l’année des réformes contre productives, ne permettant pas la réussite de tous les élèves et plaçant les personnels dans des difficultés parfois insurmontables et dans des dilemmes professionnels destructeurs. Malgré la démonstration du caractère inutile et dangereux pour l’école de la République de certains dispositifs, la circulaire les confirme tous, en réaffirmant l’assouplissement de la carte scolaire, en installant le dispositif ECLAIR, en préparant les esprits à une future école du socle qui n’a jamais fait l’objet de débats réels dans la communauté éducative., en continuant à prôner l’intérêt des internats d’excellence, des ERS, (alors même que les dispositifs existant : segpa, classes et ateliers relais, Eréa sont les grands absents du texte), en poursuivant la contre-réforme des lycées et de la voie professionnelle, en permettant l’extension du dispositif « cours le matin sport l’après midi », … Elle confirme également les dispositifs qui ont prouvé leur inefficacité et leur nuisance, concernant les professeurs stagiaires. Tout cela va à l’opposé des objectifs annoncés de réduction des inégalités scolaires et sociales.
Malgré les témoignages, rapports et expertises qui montrent le caractère dangereux de certaines mesures, la circulaire prétend que « les efforts engagés donnent déjà plusieurs résultats encourageants qu’il faut consolider » (réforme des lycées généraux et technologiques). A ce titre, les textes examinés aujourd’hui consistant à calquer dans la voie technologique des dispositifs qui n’ont pas, bien au contraire, fait leur preuve dans la voie générale sont encore significatifs d’une politique guidée beaucoup plus par le souci de dégager des moyens que par celui de s’appuyer sur les spécificités, certes parfois coûteuses, qui ont permis la réussite de générations d’élèves.
Patchwork de mesures parées pour la circonstance de toutes les vertus républicaines ou d’ouvertures culturelles, la circulaire ne parle jamais des moyens alloués au système éducatif !
Elle porte en fait la marque de la volonté politique de renoncer à une ambition éducative partagée qui soit la même pour tous.
Ressurgit une organisation scolaire que la FSU espérait révolue, avec une recréation de filières au collège et un risque de remise en place d’un palier d’orientation au milieu du cycle 5eme-4eme (évaluation fin de 5ème, 3ème ou 4ème prépa-pro, dispositif d’initiation aux métiers par alternance…). La FSU ne peut accepter qu’au détour d’une nouvelle mesure l’idée même de collège unique soit ainsi remise en cause.
Dès l’introduction de la circulaire le ton est donné : en affirmant que l’objectif « naturel » de l’école est « d’améliorer les acquis des élèves », la circulaire tourne de fait le dos à leurs apprentissages. La finalité du système éducatif serait ainsi réduite à entretenir des acquis capitalisés par les élèves, tournant le dos à l’ambition démocratique d’ouvrir tous les jeunes à une large culture dépassant l’horizon du simple savoir écrire-compter …
Au nom d’une appétence, de possibilités, de talents plus importants chez certains jeunes que chez d’autres, est abandonné l’objectif de faire acquérir à tous une culture et des compétences de haut niveau. Le socle commun de connaissances et de compétences qui était initialement présenté comme le minimum commun à maîtriser par tous les élèves lors devient non plus une base de la scolarité obligatoire mais sa finalité, signe d’un formidable recul de ce que seraient les exigences de la société envers son école.
Dans l’enseignement professionnel la mise en place de passerelles vers la voie technologique et vers l’enseignement supérieur et notamment les BTS n’est pas suffisamment affirmée. L’enseignement professionnel ne se réduit plus uniquement à l’insertion et les poursuites d’études ne doivent pas être limitées. Seront d’ailleurs présentés à ce CSE deux textes provocateurs relatifs aux maîtres d’apprentissage et à la taxe d’apprentissage alors qu’il serait plus utile de dégager des moyens nécessaires pour des parcours valorisant l’élévation de la qualification des jeunes de la voie pro.
Est confirmé le livret personnel de compétences, lié au socle commun, dont la mise en œuvre pose d’énormes problèmes, avec des items trop flous, impossibles à remplir ou posant des questions lourdes de conséquences tant en terme de définition des contenus d’enseignement qu’en terme de lisibilité du système par les usagers. Ainsi, un exemple qui peut paraître anecdotique ou très particulier est éclairant : le seul savoir propre à l’EPS dans le socle est le savoir nager. Les professeurs des écoles et enseignants d’EPS ont toutes les raisons de s’interroger : dans quelle mesure la validation de la compétence 7 par l’équipe pédagogique, sans que l’item « savoir nager » ait été validé, par exemple si l’établissement n’a pas accès à la piscine, est-elle susceptible d’engager leur responsabilité ? C’est là une situation inédite que de valider une compétence incluant le « savoir nager » au poids social très lourd, sans que celui-ci ait été vérifié.
On pourrait prendre bien d’autres exemples des incohérences contenues dans ce livret. Il est urgent de revenir à des principes simples et lisibles en matière d’évaluation des élèves. Un poids de plus en plus pesant est donné aux évaluations nationales, comme si cela suffisait aux élèves pour mieux apprendre. Il y a là une dérive qui minore le temps nécessaire qui doit être consacré aux apprentissages. Il est encore temps pour le ministre de prendre la décision qui s’impose en suspendant, à tout le moins pour cette année, l’imposition de ce livret personnel de compétences, à la demande notamment des syndicats de la FSU.
Nous notons également avec regret la parution d’une autre circulaire, publiée sans consultation du CSE ni discussion avec les organisations syndicales, celle sur la formation continue. Alors que cette formation continue devrait être un levier essentiel de l’amélioration de tout le système éducatif, elle est déjà très insuffisante et inadaptées aux besoins des personnels et du système éducatif, et mise à mal actuellement (comme le constatait même un récent rapport de l’Inspection générale non rendu public). Le nouveau texte n’arrange rien, bien au contraire, par exemple en éloignant la FPC des contenus d’enseignement et en étant centrée pour l’essentiel sur l’adaptation aux réformes institutionnelles.
Nous demandons une réelle négociation pour une réflexion approfondie sur les besoins en matière de formation continue.
Se poursuit l’absence de réelle concertation, le refus de dialogue social, la non prise en compte des critiques et contre propositions des organisations représentatives (l’attitude du pouvoir à propos de la contre-réforme de la formation des enseignants en est un exemple type, mais nullement exhaustif) ; cela au service d’une politique reposant sur deux axes : une école considérée comme un coût et non comme un atout à développer pour le pays et une volonté de fait de construire un système éducatif à plusieurs vitesses (avec une partie des jeunes limitée au mieux à l’accès au socle et livrée au marché du travail à 16 ans, souvent synonyme de précarité, et seulement 50% considérés comme devant accéder au niveau L3). Le gouvernement renonce à l’accès de tous les jeunes à un haut niveau d’éducation, de formation et de qualification.
Face à un système éducatif qui rencontre de réelles difficultés et n’arrive pas à jouer pleinement son rôle dans la réussite de tous, c’est une tout autre conception, ambitieuse, novatrice, dans l’intérêt des jeunes et du pays, que portent la FSU et ses syndicats. C’est pour soumettre ces propositions aux échanges contradictoires que la FSU organise actuellement de multiples débats dans tous les départements avec les personnels, les parents, les jeunes et les élus.