Les premiers éléments du budget 2020 viennent de paraître. Dans un exercice de storytelling maîtrisé qu’on lui connaît bien, le gouvernement prétend répondre aux besoins exprimés par la société. Derrière la novlangue en marche, ce budget poursuit drastiquement la réduction du périmètre de l’intervention de l’État et de ses services publics. Une politique qui ne répondra en rien aux besoins réels de services publics de qualité au bénéfice de la population du pays.
Dans l’éducation, alors que la difficulté s’exprime de mille façons, et parfois de manière dramatique, la prétendue « priorité à l’école » du gouvernement ne prévoit aucune création de postes d’agents administratif, d’assistants sociaux, d’infirmiers de médecins scolaires de CPE, d’AED, psychologues de l’EN ! Mais les suppressions d’emploi d’enseignants se poursuivent et le service public d’information et d’orientation de l’Education nationale est démantelé. 

Tropismes antisociaux

Il ne peut en être autrement quand les orientations idéologiques de ce gouvernement l’amènent à renoncer à une réelle progressivité de l’impôt tout en poursuivant les cadeaux sans fondement ni efficacité aux plus riches et aux grandes entreprises. Ainsi, la Cour des comptes vient de constater que les allégements de cotisations sociales ont cru de 26 milliards entre 2013 et 2019 dont 18 milliards au seul titre de la transformation du crédit d’impôt compétitivité emploi en allégements de charges en 2019 !

Le mouvement social de l’hiver dernier a eu pour effet, entre autres, de faire renoncer le gouvernement à son projet de suppression de 50 000 emplois de fonctionnaire d’État sur le quinquennat. 5 700 l’ont déjà été depuis 2 ans et le recours massif à des personnels contractuels en lieu et place de fonctionnaires permis avec la nouvelle loi de « transformation de la Fonction publique » est un autre moyen de poursuivre l’objectif initial. Le nombre d’agents publics baisse donc moins que prévu (dans un premier temps) mais la dépense n’est pas la même que si tous les agents étaient des fonctionnaires sur le court comme sur le long terme. Les autres mesures de cette loi (plan de mobilité, délégations au privé, …), la réforme des services déconcentrés de l’État (périmètre, missions, transferts des personnels…) et le projet de suppression du code des pensions sont les autres clés pour poursuivre la réduction des dépenses publiques.

Le gouvernement affiche sa volonté de réduire l’intervention de l’Etat aux domaines régaliens vus de manière très restrictive (justice, sécurité, mais pas les finances). Il sera difficile de lutter contre l’évasion fiscale avec la suppression de près de 2 000 emplois aux finances et comptes publics.
Aucun investissement sérieux n’est programmé sur des sujets aussi cruciaux que l’agriculture (budget stable, moins 60 emplois) et la transition écologique (+ 12 millions, moins 1073 emplois).

Éducation nationale : une priorité, vraiment ?

Le budget du ministère de l’Education nationale et de la jeunesse (qui représente presque 1/5 du budget total des ministères) passe de 51,68 Mds à 52,7 Mds soit une hausse de 1 Md. Soit à peine plus que le budget total des ministères (+1.8%).

Concernant les crédits nécessaires aux dédoublements des classes primaires et maternelles, on peut à titre de comparaison rappeler que la hausse de 1,3 Md du budget 2018 puis celle de 0,9 Md en 2019 n’ont pas permis les dédoublements annoncés sans dégradation d’autres dispositifs et redéploiements d’emplois. La création de 440 emplois dans les mêmes conditions est donc très insuffisante pour répondre aux promesses : limite à 24 élèves par classe en GS, CP, CE1, aucune fermeture d’école rurale (sauf accord maire), dédoublement progressif GS éducation prioritaire (150 000 élèves concernés) et abaissement scolarité obligatoire à 3 ans (26 000 élèves supplémentaires).

les augmentations de dépenses liées aux mesures automatiques de carrière (GVT), l’application de PPCR, le doublement de la prime REP+, la prise en charge de tous les AESH sur le budget de l’Éducation nationale…Le milliard n’y suffira sans doute pas, et il ne reste pas un sou pour les élèves du second degré, ne serait-ce que prendre en charge les 28 000 élèves supplémentaires prévus à la rentrée 2020. Ni pour revaloriser les salaires des personnels : à l’exception de la revalorisation de la prime REP+ qui ne touche qu’une infime partie des enseignants, rien à l’horizon. La mise en œuvre du 3ème volet du PPCR n’est que l’application d’une décision, déjà insuffisante, prise il y a 4 ans et repoussée d’un an par le nouveau gouvernement dès son arrivée.

Le gouvernement supprime 440 emplois d’enseignants dans le second degré, qui portent à 6 290 les suppressions dans le second degré sur les trois budgets 2018-2019-2020, alors que les effectifs d’élèves auront augmenté de 99 300 élèves sur la même période.

Les choix budgétaires ne sont pas à la hauteur des exigences de justice sociale et territoriale qui s’expriment avec force dans le pays.