M. le président, Mme et M. les membres du CSE
M. le ministre, il n’est pas encore trop tard pour prendre les bonnes décisions.
Depuis la rentrée scolaire, vous avez multiplié les «discussions» au niveau national, concertation sur l’attractivité et la revalorisation du métier enseignant, groupe de travail pour une réforme des lycées professionnels et en parallèle vous avez lancé les discussions au niveau local dans le cadre des CNR territoriaux. 840 établissements auraient d’ores et déjà démarré une concertation. Au total, près de 7 500 écoles et établissements prévoiraient de s’engager dans la démarche dans les prochains mois, soit 13 % du total des écoles et établissements en France. Plus récemment encore, vous avez invité à déjeuner des acteurs du système éducatif pour des échanges directs.
Au-delà de ces chiffres et de l’opération de communication que vous menez, on peut sérieusement se demander sur quoi vont déboucher ces consultations et discussions à tout va, et comment vont être réellement intégrées la parole et les préoccupations de la profession à votre réflexion sur les évolutions à apporter au système éducatif. La FSU tient à vous rappeler, à la veille de l’ouverture de la séquence des élections professionnelles, que la mise en place d’un dialogue social réellement à l’écoute des organisations syndicales représentatives est une priorité. La FSU reste disponible et a des propositions issues du projet éducatif pour le progrès social qu’elle porte.
Les inégalités à l’École ne cessent de se creuser. Les reformes et le sous-investissement chronique n’ont fait qu’alimenter ces inégalités, ce que les syndicats dénoncent depuis des années. La crise énergétique avec l’inflation que subissent de plein fouet les milieux populaires risquent d’accentuer cette tendance si rien n’est fait. L’école n’est clairement pas préparée à faire face aux défis de demain. Les problèmes sont pourtant connus. L’école a besoin de plus de moyens pour faire réussir tous les jeunes, les enseignant-es attendent plus de considération et l’exercice réel de leur liberté pédagogique ; il faut revoir la formation initiale et continue des personnels, redonner du temps de formations aux élèves. La lutte contre les inégalités devrait donc être au centre de l’action de l’Éducation nationale. L’éducation prioritaire subit pourtant des assauts incessants pour l’affaiblir à coups d’expérimentations. Le report de la suppression du label REP n’empêche pas le ministère, dans un contexte de pénurie de moyens, de continuer à développer les Contrats locaux d’accompagnement (CLA) sans aucun bilan du dispositif.
Les débats locaux et le financement de projets par le Fonds d’innovation pédagogique (FIP) encouragent en outre la concurrence entre écoles et établissements, et consacrent la disparition des critères sociaux d’attribution des moyens. L’expérimentation marseillaise remet profondément en cause les principes égalitaires qui fondent l’égalité républicaine.
Pour la FSU, il faut mettre en œuvre une réelle politique d’éducation prioritaire et lui donner les moyens de faire réussir les publics les plus socialement fragilisés. Ce n’est pas moins d’École ou une École à la carte dont nous avons besoin mais de plus et de mieux d’École… Une rupture totale avec les politiques menées et amplifiées ces dernières années est nécessaire en commençant par s’attaquer à la dégradation des conditions de travail et à la paupérisation de l’ensemble des personnels de votre ministère. Il y a donc urgence à réinvestir dans l’éducation mais ce n’est pas la voie que vous avez choisie.
En effet, malgré un budget de l’Éducation nationale à 60,2 milliards d’euros pour 2023, soit une hausse de 3,7 milliards d’euros, en augmentation de 6,5 % par rapport à 2022, ce budget ne couvrira même pas l’inflation. Les 935 M€ budgétés pour la revalorisation des enseignant-es ne permettront pas des augmentations de salaires généralisées. Il est à craindre, une nouvelle fois, qu’un grand nombre de personnels perdront encore du pouvoir d’achat avec une inflation annoncée galopante pour 2023. La FSU demande une revalorisation générale, sans contrepartie ou missions supplémentaires, par l’augmentation du traitement indiciaire de toutes et tous permettant de rattraper le décrochage des salaires et de prendre en compte l’augmentation des prix.
En termes d’emplois, le solde positif de 2 100 ETP est en fait la traduction de la suppression de 2 000 emplois d’enseignant-es, de la création de 100 emplois de CPE et 4 000 d’AESH. Cette sixième année de purge porte à 8381 les suppressions d’emplois d’enseignant-es dans le second degré alors que ses effectifs vont rester relativement stables. Vous présentez donc le 2ème budget le plus austéritaire des vingt dernières années, poursuivant les cadeaux aux entreprises et refusant, quoi qu’il en coûte, de taxer les superprofits. Celui-ci ne répond ni aux enjeux sociaux, ni aux nécessaires réductions des inégalités, ni à la nécessité d’une bifurcation écologique pourtant urgente.
Alors que la circulaire du 30 septembre rappelle les obligations en matière d’éducation à la sexualité, le ministère doit maintenant prendre ses responsabilités en matière d’éducation à la vie affective et à la sexualité. Les moyens nécessaires doivent être mis en œuvre pour accompagner les équipes, comme doit être renforcée la présence des personnels sociaux et de santé dans la réalisation de cette ambition, levier incontournable dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Des formations spécifiques pour tous les personnels doivent être organisées.
Or nous attirons une nouvelle fois votre attention sur la situation particulièrement alarmante des assistant-es de service social et des infirmières scolaires, pour lesquelles tant les conditions de travail dégradées que les faibles rémunérations spécifiques à ce ministère (exclusion du CTI entre autres) conduit à une augmentation des départs et à une impossibilité à pourvoir les postes vacants faute de candidatures.
Concernant l’enseignement professionnel, les professeur-es ne sont pas dupes des pseudo- concertations organisées par Carole Grandjean. Votre ministre déléguée prétend que tout est ouvert et qu’elle annoncera ses orientations et arbitrages début 2023.
Pourtant, les conclusions sont déjà écrites : développement du mixage des publics et des parcours en apprentissage, l’augmentation du nombre de semaines de stage, la révision des cartes de formation au prisme de l’intérêt économique des entreprises de proximité, et une organisation des enseignements renvoyée au local dans le cadre d’une autonomie renforcée des établissements sont des éléments intangibles des concertations. Ces discussions ne sont qu’un alibi pour tenter de diviser les personnels et faire taire la contestation. Malgré cette manœuvre les personnels restent foncièrement contre ce projet de réforme. La grève du 17 novembre a montré leur détermination à lutter dans la durée contre le démantèlement de la formation professionnelle initiale scolaire. Le SNUEP et la FSU refusent de participer à cette mascarade et demandent toujours que vous ouvriez des discussions sur d’autres bases, en s’appuyant sur un réel bilan de l’existant et en reconnaissant l’expertise des PLP. Le SNUEP-FSU avec la FSU poursuivront leurs actions dans tous les établissements pour dénoncer ce projet et en exiger le retrait.
Vos déclarations méprisantes sur les AESH, mardi à l’Assemblée Nationale ont profondément heurté une profession engagée au quotidien auprès des élèves en situation de handicap. Outre le fait qu’elles sont profondément mensongères, votre réaction cache surtout votre absence d’engagement à sortir les AESH de leur insupportable précarité et à leur donner de réelles perspectives pour une meilleure reconnaissance professionnelle. En plus de la création d’un corps de fonctionnaires de catégorie B permettant de reconnaître la spécificité de leurs missions, la FSU attend du ministère des mesures immédiates pour les AESH : une revalorisation de leur salaire qui va au-delà des annonces floues pour septembre 2023, une refonte de leur grille qui a déjà été rabotée à plusieurs reprises par le relèvement du minima de la Fonction publique, une prime REP/REP+ équivalente à celle des autres personnels, la reconnaissance du temps de travail actuel comme un temps complet et une amélioration de leurs conditions d’exercice. Les AESH valent mieux que l’indifférence et le mépris du ministère !
Enfin, la FSU réaffirme son soutien à notre collègue Cécile Kohler et exige sa libération immédiate des prisons iraniennes.