Déclaration liminaire de la FSU au CTMEN du 8 janvier 2020

Ce comité technique ministériel de l’éducation nationale se tient la veille d’une nouvelle grande journée de grève et de manifestations contre le projet de réforme des retraites envisagé par le gouvernement.

Voici cinq semaines que le mouvement de contestation est engagé. Et le gouvernement reste sourd au refus majoritaire exprimé par les salariés de voir leurs futures pensions diminuées, l’âge de départ toujours retardé, les générations et les professions traitées de manière inéquitables…

Que le gouvernement et le Président de la République se le tiennent pour dit ! Il ne sert à rien de faire des promesses selon lesquelles personne ne devrait perdre. Tout un chacun peut comprendre qu’elles sont intenables, surtout lorsqu’elles sont démenties dans la même intervention. Personne ne devrait perdre, vraiment ? Sauf celles et ceux, à commencer par les carrières longues ou les personnels fatigués en fin de carrière, qui devraient par exemple subir les effets de l’âge-pivot ! Sauf les personnels de notre ministère, enseignants ou non, dont les régimes indemnitaires sont parmi les plus faibles, pardon « les moins attractifs », de la fonction publique de l’État ! Sauf les femmes qui auront subi les inégalités professionnelles, que plus personne ne nie, et dont une des conséquences est d’aboutir à des carrières plus lentes, donc à un total de points inférieur !

Largement, ce qui apparaît derrière cette réforme, c’est l’objectif de faire travailler plus longtemps les salarié-es, de baisser le montant des pensions et de développer les recours aux assurances privées.

Pour la FSU, il faut retirer ce projet si mal ficelé qu’à chaque rustine que le gouvernement met pour tenter d’esquiver les problèmes, ils apparaissent chaque fois plus nombreux. Oui ! Il faut le retirer car les retraites des salariés méritent mieux qu’une réforme qui ressemble de plus en plus à celle d’apprentis-sorciers, à un projet aventuriste. Il faut écarter au plus vite ce danger !

Et il faut ouvrir sérieusement de véritables négociations pour en finir avec le système de décote/surcote qui pénalise tant les pensions, pour étudier les modalités de prise en compte des années d’études, pour conforter une retraite pour les fonctionnaires qui soit préservée dans sa construction à l’aune du principe du droit à la carrière et donc calculée sur la base de 75 % du traitement perçu durant les 6 derniers mois.

Et, à rebours du discours ministériel sur le sujet « retraites », il est nécessaire de rouvrir des concertations sur l’ensemble des problématiques liées à l’exercice des métiers tout au long des carrières, aux conditions de travail, à la formation professionnelle, aux missions…

D’ailleurs, ce CTMEN se tient le lendemain de la publication du rapport de l’IGESR suite au suicide en début d’année scolaire de notre collègue Christine Renon.

Le groupe de travail du CHSCT du Ministère de l’Éducation nationale initié sur la prévention des risques et des actes suicidaires tiendra sa première réunion vendredi prochain. La FSU demande depuis longtemps un travail de fond sur cette question. Elle tient à souligner que cette initiative ne prendra véritablement sens que si elle est l’occasion d’une analyse approfondie et objective des éléments de l’organisation institutionnelle du travail qui génèrent les risques psychosociaux. Pour cela doivent être mesurés les inadéquations qui existent entre les demandes faites aux personnels et les moyens dont ils disposent pour y répondre. Doivent aussi être examinées les stratégies managériales toujours plus injonctives et qui empêchent un exercice professionnel responsable basé sur l’expertise des personnels, et le confinent dans la simple exécution de consignes, créant ainsi une perte de sens de l’activité professionnelle. La FSU rappelle que le ministre a la responsabilité de la santé au travail des personnels et qu’il doit assurer leur bien-être physique, mental et social dans leur activité professionnelle.

Les résultats de la consultation sur l’exercice de la fonction des directeurs et directrices d’école, présenté hier, confirment ce que dit la FSU depuis de nombreuses années. Le ministère ne peut plus fermer les yeux et doit engager dès maintenant, des actions concrètes pour répondre aux besoins en temps (augmentation de la décharge d’enseignement), en personnels supplémentaires (emplois d’aide à la direction et au fonctionnement de l’école) et en formation (54% des directeur-trices n’ont bénéficié d’aucune formation liée à leur fonction). Il est à noter que si les directeurs-trices exigent une reconnaissance de leur fonction, ils marquent une nouvelle fois leur opposition à un statut spécifique : moins de 10% d’entre eux évoquent cette possibilité. Des réponses à la hauteur des attentes et des revendications exprimées, en octroyant les moyens nécessaires, doivent être rapidement proposées.

Sur une autre question − à propos de laquelle la FSU réaffirme qu’elle doit être traitée indépendamment du projet de réforme des retraites − celle de la revalorisation des carrières et des rémunérations de l’ensemble des personnels de l’éducation nationale, il est aussi urgent que soient ouverts tous les sujets qui y sont liés : rattrapage indemnitaire, revalorisation des grilles, point d’indice… car, finalement, toutes les composantes de la rémunération des personnels ont été maltraitées depuis deux années et demie. Et pour la FSU, il ne saurait être question de conditionner les revalorisations attendues à des tâches supplémentaires, à des augmentations de charge ou de temps de travail, à des dénaturations des métiers ou de leurs conditions d’exercice, ou encore au développement d’individualisation accrue des indemnités dont le corollaire serait le développement de l’arbitraire et l’accroissement des inégalités salariales.

Nous ne reprendrons pas tous les sujets sur lesquels nous nous sommes déjà exprimés dans notre déclaration faite à l’occasion de la séance du CTMEN du 18 décembre dernier.

À l’ordre du jour du jour de ce CTMEN, sont inscrits les examens des deux projets d’arrêtés devant encadrer les conditions de la formation des personnels de direction et des personnels d’inspection.

Les projets d’arrêtés soumis à l’avis de ce CTMEN font passer la durée de formation de 36 jours à 154 heures. Ce n’est rien d’autre qu’une nouvelle réduction de cette formation nationale qui est opérée ! Et ceci tourne le dos à l’ambition de garantir une formation professionnelle suffisante. D’autre part, le principe d’un complément assuré au niveau académique mériterait d’être précisément défini au niveau national. Ce n’est toujours pas le cas. Il en ressort une forte disparité tant du point de vue quantitatif que qualitatif qui pose problème pour assurer l’accompagnement nécessaire.

De plus, pour les personnels d’inspection, la FSU revendique une formation professionnelle nationale d’une année, préalable à toute affectation en responsabilité et bien sûr, partie intégrante du déroulement de carrière. Cette même exigence d’un temps de formation préalable à la prise de fonction est également une nécessité pour les personnels de direction et d’encadrement.

Pour la FSU, ces projets de nouveaux arrêtés ne vont pas dans le sens d’un retour vers une formation professionnelle à la hauteur des enjeux de l’accompagnement des personnels enseignants et de la direction des EPLE.

À l’ordre du jour est inscrite l’information des organisations syndicales représentées au CTMEN sur les projets ministériels pour Canopé. Il est temps… Car les annonces brutales faites au CA du 18 décembre devant les répresentant-es des personnels qui y sont élu-es ont provoqué colère et indignation tant il leur est apparu que Canopé est la cible d’un projet de démembrement de ses structures territoriales. Ces décisions, si telles elles sont, prises sans aucun débat sur la richesse des métiers qui structurent aujourd’hui l’opérateur et sur les besoins des usagers, prennent le contrepied dans les faits des affirmations faites à plusieurs occasions selon lesquelles Canopé ne serait pas affaibli.

Au moins, les intentions sont dans leurs grandes lignes désormais connues. Affaiblissement du maillage territorial du réseau, abandon de nombreuses missions dont l’édition papier (alors même que l’opération de communication ministérielle « un livre pour les vacances » laisse à la charge de l’opérateur des centaines de milliers d’euros) pour recentrer l’activité sur la production de ressources numériques… Sans oublier le démembrement du réseau de ses ateliers qui, transférés aux académies, ceux-ci seraient alors tournés principalement vers la mise en œuvre du  schéma directeur de la formation continue.

Le projet ministériel relève donc bien d’un abandon des missions de service public et du détournement d’une partie de l’opérateur de ses missions d’intérêt général, pour la soumettre aux contingences d’une politique largement contestée par les enseignant-es et tous les personnels de l’éducation car elle réduit par trop la formation continue à l’accompagnement des réformes, bien davantage qu’à l’évolution des métiers de l’éducation et à la réponse aux besoins des personnels.

Pour la FSU, soucieuse de préserver un opérateur largement reconnu, son réseau et maillage territorial, les compétences et les richesses des métiers qui le structure, soutient la mobilisation des personnels de Canopé pour défendre leurs métiers, leurs savoir-faire, leurs apports ô combien utiles et nécessaires au service public d’éducation !