Les compagnies aériennes annoncent un retour à la normale en 2023-2024. Qu’en penser?

C’est quand même un peu incantatoire. Il est vrai que d’un côté, la reprise pourrait venir de la « moyennisation » du monde. En
Asie, les classes moyennes sont de plus en plus nombreuses. On peut imaginer que dès qu’elles en auront l’opportunité, ces centaines de millions de personnes prendront l’avion. Mais d’un autre côté, les classes affaires, qui rapportent gros, sont en chute libre à cause du télétravail, des vidéoconférences, voire de la relocalisation d’activités. La panne de croissance fait aussi douter.

Les comportements et les modes de consommation vont-ils changer?

Le tourisme a été la locomotive de la croissance du transport aérien. Mais le modèle avion low cost / Airbnb tremble sur ses bases avec des mouvements anti invasion touristique, comme à Barcelone ou Venise. La honte de prendre l’avion révèle également une question culturelle : comment se poser dans le monde en tant qu’individu face au changement climatique ? Or,
si l’on veut voyager, il n’y a pas grand-chose pour le moment comme alternatives à l’aérien. Autrichiens et Suisses ouvrent
des lignes de trains de nuits, par exemple, mais cela reste anecdotique. En France, le produit de la toute nouvelle écotaxe
annoncée par Élisabeth Borne, est une bonne piste et pourrait servir à financer des transports plus écologiques, ferroviaires
également.

Quelles évolutions dans la construction pour réduire l’impact sur l’environnement?

Des progrès sont déjà faits pour réduire la consommation des moteurs. Les avions pourront être tractés jusqu’en bout de piste
de décollage. Pour économiser du poids, on utilise la fibre de carbone, des sièges sont plus ns, etc. Mais tout cela reste du
rafistolage par rapport aux enjeux, comme la proposition de l’ IATA de financer la plantation d’arbres pour compenser les
émissions de C02. Pour parvenir à l’objectif de l’UE, l’économie neutre en carbone pour 2050, il faudra développer l’avion
électrique et l’avion à hydrogène. Mais Il va falloir des années de recherches et de tests pour y arriver. En France, Finis’tair veut
acheter un Cessna électrique de 9 places, en cours de certification ; mais les gros porteurs, eux, relèvent encore de l’utopie.

Interview issue de la revue POUR n°227, octobre 2020; à lire ici!