L’école face au « choc » du tri social (POUR n°256)

Pour les élèves en difficulté scolaire, le gouvernement propose de démultiplier les stages de réussite, l’accompagnement personnalisé, le tutorat comme de favoriser le redoublement. Pourtant, les interventions individualisées en dehors de la classe n’ont jamais réussi à faire face aux difficultés scolaires tandis que la recherche a démontré les effets délétères du redoublement.

Les enquêtes internationales telles que Pirls, PISA et TIMSS fournissent des perspectives comparatives sur le redoublement. En France, le taux de retard est de 22 %, bien au-dessus de la moyenne de l’OCDE de 12 %. Les résultats mettent en évidence un lien entre le redoublement et les inégalités sociales, renforçant ainsi la ségrégation scolaire. De plus, les études ne montrent pas d’effets bénéfiques du redoublement à long terme sur les performances scolaires des élèves. Cela pourrait avoir au contraire des graves conséquences comme des risques accrus de décrochage scolaire, ainsi que des effets négatifs sur le fonctionnement psychosocial des élèves. Pour le chercheur américain Shane Jimerson, « Si le redoublement était un médicament, il serait interdit, car il n’a pas fait la preuve de ses bénéfices, et s’accompagne régulièrement d’effets secondaires négatifs ». Depuis les années 2000, les ministres successifs ont introduit de nombreux dispositifs hors de la salle de classe : activité pédagogique complémentaire (APC), stage de remise à niveau pendant les vacances ou autres dispositifs comme les « vacances apprenantes ». Le rapport Galand en 2017 note que les travaux de recherche sur ces sujets n’ont jusqu’ici jamais pu apporter d’indices convergents de l’efficacité ni de l’individualisation, ni de la différenciation pour réduire l’écart entre les élèves en difficulté et les autres. Pour le sociologue Pierre Merle, « Ce discours conservateur apporte une solution individuelle à un problème structurel. La réussite scolaire ne dépend pas d’un élève en particulier, mais des conditions d’apprentissage tels que le nombre d’élèves par classe et les pédagogies mises en œuvre ». L’individualisation forcenée poursuivie par le « choc des savoirs » accentuerait ainsi les disparités internes au système éducatif français, contribuant ainsi à une école de plus en plus marquée par la ségrégation, très loin de résoudre les inégalités de réussite selon l’origine sociale.

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